Dans Penser/Classer de Georges Perec on trouve un texte que j’adore, rien que pour son titre : Note brève sur l’art et la manière de ranger les livres. Au fur et à mesure de l’accroissement de ma bibliothèque, au grès de mes déménagements, mon système pour ranger les livres c’est plus ou moins fixé. Il procède, comme le fait remarquer Perec, de plusieurs points de vues, à la fois spatiaux et pratiques, dépendant de l’ouvrage lui-même, de sa collection, de sa taille, de la temporalité son écriture, de son origine, de son genre, du lieu où j’habite, de la lumière.
Dans la pièce dite, bibliothèque, ou dans le salon s’il est équipé de ce meuble, je range les romans avant tout. Les ouvrages d’art se retrouvent souvent dans le hall ou les couloirs, les ouvrages dits professionnels, psy ou autre, dans mon lieu de consultation pour la plus part. Certains trainent de ci de là, sans réelle place.
Les livres de recettes sont à la cuisine, les revues un peu partout, et aux toilettes, je range en ce moment les guides de voyage et les livres consacrés à la Suisse.
Les romans sont classés par langues et origine. D’abord la littérature française, où les livres sont regroupés par siècle, avant le XVIIeme, XVIII, XIX ; XX et XXIème étant regroupés. Ensuite, ils sont classés par ordre alphabétique dans chaque siècle. Le rangement débute par le haut de la bibliothèque de telle façon que le XIX et le XXème siècle se retrouvent à la hauteur de mes yeux. Ensuite je range les romans de langues anglaise, allemande, italienne, espagnole, russe, japonaise puis chinoise. Par ordre alphabétique parfois. Il existe une rubrique finale pour les langues dont je ne possède que peu de représentants. Le turc, Pamuk, se retrouve à côté du suédois, Carl-Henning Wijkmark ou du norvégien, Knut Hamsun, et de ceux dont il m’est difficile de déterminer l’origine ; ainsi l’ Eloge des Femmes Mûres de Stephen Vizinczey est certes écrit par un hongrois, mais en langue anglaise et fut publié au Canada.
Echappe à cette règle un rayon Proust qui regroupe une édition en folio de La Recherche, (celle en Pléiade restant dans le rayon Pléiade) d’autres livres de Marcel, des essais, des livres de photo, et un rayon L.F.Céline qui répond à la même logique.
Cependant sont exclus de cet ordre : les romans policiers et de science-fiction (rangés tout en haut de la bibliothèque), les Pléiades, regroupés ensemble, comme les Portiques, en général rangés pas très loin, les éditions rares, originales, (pas si nombreuses que cela et formant un ensemble assez disparate qui me chagrine), les livres qui ne rentrent pas dans l’espace des étagères (les cahiers de L’Herne par exemple ne sont pas avec l’auteur auquel ils sont consacrés).
Sont aussi à part, les livres que je n’ai pas encore lus, ce que je viens de lire et que je n’ai pas rangés, ceux que l’on m’a prêté et que j’espère un jour rendre à leur propriétaire, s’il les réclame, ceux dont je veux me débarrasser, soit parce que je ne l’ai pas aimé, soit car je le possède déjà et acheter par mégarde en double.
Les essais littéraires et la poésie sont sur leurs propres rayons, et jouxtent étrangement la philosophie et la photo, qui est à part du reste des livres d’art et d’architecture.
Autre exception, le rayon japonais où se côtoient non seulement des romans mais aussi des essais, des anthologie de Haïkus, des ouvrages techniques sur l’art, des dictionnaires et même une méthode d’apprentissage de la langue en deux tomes dont je n’ai suivi que les deux premières leçons.
Les ouvrages sur le cinéma sont classés à part ; comme les dictionnaires, rangés avec les traités de rhétorique, de ponctuation, les ouvrages sur l’iconographie, des Saints, de la Bible, des Monstres…
Il y a un « enfer ». Il est perché tout en haut et caché par des livres qui ne m’intéressent pas mais dont je n’arrive pas à me défaire.